
Bienvenue chez vous
Quand l’idée d’être enfermé paraît brimer
le concept du droit à la paix intérieure.
Lorsque le terme « obligation familiale » se résume
en un refuge soudé par le lien existentiel de ses occupants.
Quand la relativité temporelle s’étire et se prolonge
pour atteindre les limites de la physique individuelle.
Le choix qui s’impose se teint aux alarmes
des veilleurs de l’ordre et de la sécurité.
Éternels insatisfaits, seule la progression de notre quête
personnelle nous rassasie momentanément.
Aussitôt un but achevé, aussitôt s’enclenche la nécessité
de l’outrepasser, de l’archiver, après s’en être étalé.
Le repos, le temps passé avec les siens et le rythme
de vie plus humain qui nous ont été greffés
nous affligent, alors que des millions de voix
résonnent encore en écho dans l’univers.
Le bon génie aura entendu et exaucé d’un coup
toutes ces requêtes implorées,
bien qu’un détail important manquât à l’énoncer.
Une variable viendra tout perturber : le danger.
La peur d’avoir peur, seule accompagnatrice
de cette nouvelle réalité, nous diminue…
Une pause surpassant l’espérance, de sa disponibilité,
met à rude épreuve nos mœurs d’hyperventilés,
se faisant constamment dicter quoi faire,
comment le faire et quand le faire…
La peur d’être débranché… de ce qui maintien encore
un fragile équilibre quant à notre animosité épilée,
alors que l’actualité déprimée étourdie les confinés.
Les malades de solitude chronique se sentent étonnamment moins seuls.
Le plus fortunés se voient bénéficier d’une permission, d’une récré.
Les rues des quartiers sont piétinées par des citoyens
redécouvrant le simple plaisir d’aller marcher.
Quand prendre l’air est l’une des rares activités extérieures autorisées,
la simple promenade prend ses grands airs de liberté.
Malheureusement, les pavés minés
de menaces potentielles à contourner
nous confrontent à l’inévitable éventualité de croisé des apeurés.
Même si un simple sourire suffit parfois à nous rassurer,
nous rappeler que nous sommes tous angoissés
et absorbés par le même désir de demeurer en santé.
Les circonstances errantes diffusent un bémol dans l’air.
Dans l’attente de solutions ou d’un remède miracle,
la crainte de tout voir empirer est bien installée.
Paralysés, les libérés acculés sont soumis
à la peur viscérale de voir modifier
cette routine imposée, dictée et… habituée,
comme une seule et unique réalité à dupliquer.
À force d’être traité à la manière de numéros,
on en vient à oublier qui l’on est,
Des hommes et des femmes portés
par un caractère, des valeurs… des passions.
L’éloignement tend à faire croire
que les liens étirés pourraient se briser.
Ironiquement, la technologie nous ayant divisés et individualisés,
nous permet, en ces jours sombres, de voyager,
de nous rassurer, de nous dire : « À bientôt, j’espère !»,
« En espérant que le pire soit derrière » ou
« À Dieu, chers pairs… »
Écrit par Etienne Minier
mars 2020
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